Comme la Fed au mois de juillet dernier, la BCE augmente ses taux directeurs de 75 points de base. Du jamais vu en plus de 20 années d’existence.
La rumeur bruissait. La BCE allait augmenter ses taux directeurs de 0,75 point de pourcentage. Le consensus des analystes se vérifie donc. Le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne, ce 8 septembre, annonce relever ses taux directeurs de 75 points de base. « Une décision prise à l’unanimité », affirme Christine Lagarde, présidente de la BCE.
Cette dernière s’aligne ainsi avec la Fed, qui en est, toutefois, à deux hausses consécutives de cet ordre. L’uppercut du 28 juillet dernier succédait ainsi à une première opération coup de “point” annoncée par Jerome Powell le 16 juin. « Pour ceux qui affirment constamment que la Banque centrale est à la traîne, je vous rappelle que notre politique a démarré en décembre dernier quand nous avons décidé de mettre un terme à l’APP et au PEPP », a ironisé la présidente.
Further is coming
L’Europe fait face à la même flambée inflationniste que le marché américain. Pire, alors que les Etats-Unis ont connu un ralentissement dans la hausse des prix (8,5% en juillet contre 9,1% en juin), en Europe, la tendance ne semble pas s’inverser. Selon Eurostat, l’inflation s’établissait à 9,1% (en glissement annuel) dans la zone euro le mois dernier, contre 8,9% en juillet. Dans certains pays comme l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, la hausse de l’indice des prix dépasse même les 20% sur le mois d’août.
Dès lors, après la hausse de 50 points de base du mois de juillet dernier, la BCE a décidé de frapper plus fort « afin de freiner la demande », pointe un communiqué de l’autorité monétaire. Et ce n’est pas terminé. « Le Conseil des gouverneurs […] prévoit de continuer à relever les taux d’intérêt directeurs, parce que l’inflation reste beaucoup trop forte et qu’elle devrait demeurer supérieure à l’objectif pendant une période prolongée. […] L’envolée des prix de l’énergie et des produits alimentaires, les pressions sur la demande dans certains secteurs sous l’effet de la réouverture de l’économie et les goulets d’étranglement du côté de l’offre continuent d’alimenter l’inflation. Les tensions sur les prix se sont encore amplifiées, et généralisées dans l’économie, et l’inflation pourrait encore s’accélérer à court terme ».
Comme à chaque annonce de taux, les perspectives s’assombrissent. Les services de la BCE tablent désormais sur une inflation de 8,1% pour 2022. Bien loin des 5,1% anticipés en mars dernier. L’objectif de 2% ne devrait pas être atteint avant 2024. Sur ce point, pas de changement par rapport aux prévisions du début d’année. Côté croissance, ce n’est guère plus réjouissant avec 2,1% en 2022, mais 0,9% en 2023.
APP pareil
Avec cette nouvelle hausse, les taux d’intérêt des opérations principales de refinancement, de la facilité de prêt marginal et de la facilité de dépôt atteindront respectivement 1,25 %, 1,50 % et 0,75% à compter du 14 septembre 2022.
En revanche, pas de changement côté politique de rachat d’actifs. Le réinvestissement des remboursements de titres acquis dans le cadre de l’APP se poursuivra « aussi longtemps que nécessaire pour maintenir les conditions d’une liquidité abondante et une orientation appropriée de la politique monétaire », précise le communiqué de la BCE. Pour le PEPP, les réinvestissements sont maintenus au moins jusqu’à la fin de 2024.
Enfin, s’agissant de l’outil anti-fragmentation dont les contours étaient dévoilés en juillet dernier, Christine Lagarde est restée évasive. « Je n’ai pas grand chose à ajouter sur ce sujet par rapport à juillet. Il a été débattu, approuvé à l’unanimité et des critères de mises en œuvre précis ont été définis. Quand ces critères seront remplis et que les conditions d’éligibilité seront réunies, nous serons prêts à recourir au Transmission Protection Instrument (TPI) », a-t-elle déclaré en conférence de presse. Wait and see.