La FED a frappé fort pour tenter de juguler l’inflation aux Etats-Unis. La réserve fédérale a remonté ses taux directeurs de 0,75 point. Du jamais vu depuis 1994.
Nom de Zeus ! La FED a pris place dans sa DeLorean DMC-12 destination 1994. Ce mercredi 16 juin, à l’issue de la réunion de son comité de politique monétaire, la Réserve fédérale a ainsi décidé d’augmenter ses taux directeurs de 0,75 point pour les faire atterrir dans une fourchette comprise entre 1,5% et 1,75%. Un tour de vis inédit depuis 28 ans.
« Le Comité est fermement déterminé à ramener l’inflation à son objectif de 2%, pointe la FED dans un communiqué. L’invasion de l’Ukraine par la Russie cause d’énormes difficultés humaines et économiques. L’invasion et les événements connexes créent une pression à la hausse supplémentaire sur l’inflation et pèsent sur l’activité économique mondiale. De plus, les blocages liés au Covid en Chine sont susceptibles d’aggraver les perturbations des chaînes d’approvisionnement ».
Au mois de mai, l’inflation aux Etats-Unis flirtait avec les 9% (8,6%) en rythme annuel. Et les économistes de la Fed tablent désormais sur 5,2% pour l’année 2022, contre 4,3% lors de leurs précédentes évaluations en mars. Des prévisions nettement en dessous de celles d’Axa IM qui agite le spectre de la stagflation, avec une flambée des prix estimée à 7,6% pour l’année en cours.
Le coût du point américain
L’augmentation des taux directeurs annoncée hier est donc nettement plus élevée que celles envisagées par la Fed lors de son dernier relèvement. Au mois de mai dernier, Jerome Powell évoquait des hausses de 50 points de base. La norme semble désormais plutôt s’orienter vers au moins un autre resserrement aussi spectaculaire. En conférence de presse, Jerome Powell a ouvert la porte à une nouvelle hausse de 50 pb ou 75 pb lors de la prochaine réunion de la Réserve fédérale fin juillet. La FED vise ainsi un taux directeur médian – c’est-à-dire le taux des Fed funds – de 3,4% fin 2022, 3,8% en 2023, puis 3,4% en 2024.
Reste maintenant à savoir quelles incidences auront ces tours de vis sur l’activité et le chômage aux Etats-Unis. « L’activité économique globale semble s’être redressée après avoir légèrement fléchi au premier trimestre. Les créations d’emplois ont été robustes au cours des derniers mois et le taux de chômage est demeuré faible », indique la Réserve fédérale américaine. Mais la croissance estimée pour 2022 de l’autre côté de l’Atlantique fond comme neige au soleil. Evaluée à 2,8% au mois de mars dernier par les économistes de la FED, les perspectives la place désormais à 1,7%. Le chômage se maintiendrait à 3,7% contre une prévision à 3,5% au printemps dernier.
Deux salles, deux ambiances
En revanche, le comité de politique monétaire n’a pas changé son fusil d’épaule s’agissant de la réduction de son bilan. « Le Comité continuera de réduire ses avoirs en titres du Trésor, en dette d’agence et en titres adossés à des créances hypothécaires d’agence, comme décrit dans les plans de réduction de la taille du bilan de la Réserve fédérale publiés en mai », lit-on dans un communiqué. Autrement dit, l’institution retirera 47,5 milliards de dollars de liquidités des marchés par mois. Avant de passer en septembre à un rythme mensuel de 95 milliards.
Les annonces de la FED tranchent avec celles de la BCE. La Banque centrale européenne adopte une stratégie plus « progressive » sur la remonté de ses taux directeurs. Dans la bataille contre l’inflation, chacun a son point… de vue.